Les gilets jaunes et la fin d’une ère politique
« Les Impôts et les taxes, ça suffit ! »
Non ce n’est pas l’expression d’un gilet jaune… mais de Bruno Le Maire. [1]
Le ministre de l’économie et des finances a pourtant proposé la taxe sur les GAFA et défendu celle des carburants.
Il vient ensuite exposer devant l’assemblée qu’il faut « arrêter d’augmenter les taxes » dans la plus complète décontraction.
Pour rappel, c’est aussi lui qui disait que Macron n’avait « pas de projet » et que c’était « une coquille vide » [2] avant de rejoindre son parti puis devenir son ministre
Mon sujet d’aujourd’hui ne sera pas sur M. Le Maire en particulier mais sur les politiciens et leur fin programmée.
Les chevaliers de vertu
Ils vont réduire le chômage et la pauvreté, sauver la planète, et relancer l’économie.
Ils ont compris les problèmes du monde et des français. Ils vont agir pour changer les choses, pour créer un monde meilleur.
Ils ont le verbe et la hargne. Ils font bonne impression.
Et pourtant ils échouent… encore et toujours.
Alors on essaie autre chose (un autre politicien, un autre parti…), en se disant qu’il ne sera pas aussi entaché par les mauvaises habitudes, qu’il aura des idées nouvelles et qu’il saura restaurer notre pays.
On se dit, comme Sir Bernard Shaw que « les hommes politiques, comme les couches, doivent être changés souvent et pour les mêmes raisons. »
Mais non, là encore, c’est un échec.
On retrouve toujours les mêmes réflexes, la même manière de nous mener et finalement la reproduction en vase clos d’un système à bout de souffle.
La route de la servitude
La situation actuelle me fait penser à un livre, paru en 1944, de l’économiste Friedrich Hayek La route de la servitude dans lequel il expliquait la lente dégénération de la démocratie et sa transformation en en régime totalitaire.
Il expliquait en gros que le problème commence lorsque l’on confie l’autorité à des vendeurs de rêve.
Ceux-ci nous promettent des mesures qui sont objectivement contraires au bien-être du peuple mais faciles à vendre au public : contrôle des prix, des salaires, de la concurrence, promesse de grands projets, de sécurité sociale ou alimentaire, etc…
Les politiciens ont l’air sérieux et honnêtes et finalement ils nous déçoivent.
Premièrement, leur comportement est contraire à ce modèle de « chevalier de vertus » dont ils se drapent. Hayek l’explique ainsi :
« Le fait d’agir pour le compte d’un groupe semble libérer les hommes de maintes entraves morales qui interviendraient s’ils agissaient d’une façon individuelle, à l’intérieur du groupe. »
Etant les « représentants du peuple », les élus se sentent affranchis de certaines questions morales.
C’est pour cela que le gouvernement Macron n’a pas vu en quoi une augmentation des taxes sur l’essence pourrait soulever un problème.
Pour eux c’est forcément l’œuvre d’une conspiration extrémiste… forcément !
Evidemment, vu que ce gouvernement est la représentation du peuple et de sa volonté : les mouvements contraires sont donc contraire à l’esprit français et à la volonté française !
Pour les élites qui nous gouvernent ils sont le « sommet » du peuple et vous êtes « la base » censée être en adéquation avec ceux que « vous » avez élus.
Ils oublient un peu vite qu’ils sont le produit d’un système électoral et d’un contexte politique.
En l’occurrence Macron a été, choisi à mon avis, car il était en rupture avec les partis traditionnels qui ont déçu et, contrairement à d’autres partis d’opposition, il ne prenait pas une position trop radicale ou autoritaire.
Croire que la majorité l’a désigné car elle a une totale confiance en sa capacité à nous diriger est complètement faux.
Échecs après échecs…
Deuxièmement, ils choisissent des mesures qui sont inefficaces et dispendieuses des deniers publics.
Je prends un seul exemple : l’Etat a toujours pensé qu’il était légitime pour créer des logiciels et des programmes informatiques de pointe plutôt que d’acheter des programmes existants et développés par des entreprises qui ont fait leurs preuves.
Je vous le donne en mille : à chaque fois ça a été un échec cuisant…
Quelques exemples :
Le logiciel Louvoie pour la paie des militaires : des retards dans les paiements tandis que d’autres reçoivent bien plus que leur solde habituelle. Une catastrophe autant pour les finances que pour la crédibilité de l’institution. [3]
Le logiciel Sirhen pour les RH de l’éducation publique : 320 millions engloutis dans un programme inefficace qui finalement sera annulé. Du pur gaspillage de ressources ! [4]
Et là je ne fais que ressortir les deux dernières nouvelles de ce mois… car ça fait des années que ça dure ! [5]
Que retire le gouvernement Macron de ces leçons des gouvernements précédents ?
Rien… il lance même un programme informatique qui traquera les réseaux sociaux pour déceler les fraudeurs fiscaux. [6]
Je vous donne rendez-vous dans deux ou trois ans. Je prends les paris : ce programme sera un terrible échec et son budget aura doublé…
Remplacer les politiciens par des « populistes »
Evidemment, tous les pays sont concernés par ce mal.
Même les paisibles suisses découvrent que leurs politiciens sont corrompus et gaspilleurs à souhait. [7]
Le problème qu’a souligné Hayek et que nous avons expérimenté durant le siècle précédent est que face à l’échec d’un gouvernement démocratique, nous tendons à voter pour un nouveau « sauveur ».
Ce sauveur parle de manière franche et veut des mesures drastiques pour nettoyer la fange des gouvernements précédents.
Il est en rupture avec les politiciens traditionnels : il parle sans emphase, avec un langage populaire et il propose des mesures « de bon sens ».
Et souvent, ces « sauveurs » font plus de mal que de bien.
Le populiste : rupture ou continuité ?
Mais Hayek pense que cette phase suivante, n’est pas réellement une rupture.
Nous plaçons toujours autant d’espoir en le gouvernement.
En confiant le pouvoir à des gens « populistes » ou « populaires », qu’ils soient de gauche, de de droite, ou « ni de gauche ni de droite », nous ne faisons que confirmer notre croyance en une direction par le sommet.
Souvent, nous allons même jusqu’à accepter qu’ils aient encore plus de pouvoir que les gouvernements précédents.
Et l’histoire nous montre que cela a été un échec encore plus grand… et qu’il s’est accompagné de terribles épreuves.
Répétition de l’histoire ?
J’ai vécu plusieurs années à Prague et j’ai passablement visité les pays de l’ex bloc soviétique. Le communisme laisse encore des traces profondes dans ces pays.
Vous connaissez aussi, comme moi, les horreurs historiques des régimes totalitaires de l’occident : franquisme espagnol, fascisme italien, nazisme allemand, régime de Vichy…
Je ne crois pas que nous pouvons renouveler cette histoire, ni que notre situation soit réellement comparable.
Je pense même que l’utilisation de termes comme « fascisme », « racisme » ou « extrême droite » dont usent et abusent les journalistes pour décrire les mouvements actuels sont factuellement faux et même dangereux.
Je pense cependant que nous pourrions avoir des variantes, modernes, de régimes tout aussi néfastes.
Pour moi, il s’agit pour nous d’être vigilants, en permanence, vis-à-vis du gouvernement et de garder un scepticisme constant envers les vendeurs de rêve, les révolutionnaires et les mesures politiques aux belles apparences.
Ma lettre semble sans doute très « conservatrice » et peu courageuse … mais je pense qu’au contraire il faut une grande vaillance pour ne pas se laisser bercer par des illusions d’un côté, et mener de faux combats de l’autre…
Dites-moi ce que vous en pensez en laissant un commentaire ci-dessous.
Je me réjouis de vous lire !
À votre bonne fortune,
Frédéric Duval
Le Vaillant Petit Economiste
Sources :
[1] https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/budget-les-impots-et-les-taxes-ca-suffit-lance-bruno-le-maire-135755
[2] https://www.ouest-france.fr/politique/edouard-philippe/poison-coquille-vide-quand-les-ministres-se-payaient-macron-5000357
[3] https://www.lemonde.fr/societe/article/2017/02/02/paie-des-militaires-les-rates-du-logiciel-louvois-peseront-jusqu-en-2021_5073204_3224.html
[4] https://www.capital.fr/economie-politique/apres-avoir-englouti-320-millions-deuros-le-logiciel-rh-de-leducation-nationale-est-abandonne-1299102
[5] http://h16free.com/2015/06/25/39955-linformatique-et-ladministration-ca-fait-vraiment-10
[6] http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2018/11/14/31001-20181114ARTFIG00162-traquer-les-fraudeurs-grace-aux-reseaux-sociaux-ou-l-extension-continue-de-la-surveillance.php
[7] https://www.letemps.ch/suisse/geneve-linconsequence-certains-elus-gestion-leurs-depenses
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